Jouer sans culpabiliser permet d’être plus efficace

Winston Churchill vient de fêter ses 40 ans et il se sent comme une grosse merde. Il s’est fait jeter de son poste de Premier Lord de l’Amirauté (un équivalent du ministère de la Marine française) et sa carrière politique patine. Pendant que la Première Guerre Mondiale ravage le monde, il est privé du pouvoir d’agir. On l’enferme dans un rôle de conseiller dont les conseils ne sont pas écoutés. On lui aurait demandé de rester chez lui à se tourner les pouces pour regarder par la fenêtre le pays cramer, ce serait la même chose.

Son stress et son anxiété montent en flèche. Plus les jours passent et plus il se rapproche du nervous breakdown au même rythme qu’un allemand sur une autoroute française. Un dimanche matin, il s’emmerde tellement qu’il décide d’utiliser le kit de peinture des enfants. A ce moment là, il réalise qu’il vient de trouver LE truc qui va lui sauver la vie.

Il devient complètement camé à la peinture. A tel point qu’il rédigera un essai intitulé Painting as a Pastime dans lequel il vante les bienfaits de sa nouvelle drogue. Il sera même l’auteur de plus de 550 tableaux au cours de sa vie ! Mais surtout, c’est grâce à son loisir préféré et la maîtrise de l’art de la glande que Churchill est aujourd’hui considéré comme un des plus grands leader européen.

Le jeu permet de couper du travail

Toutes celles et ceux qui ont un jour essayé de calmer leur cerveau le savent : il n’y a pas de bouton on off pour décrocher du travail. On continue de penser boulot h24 que ça nous plaise ou non. Churchill était confronté au même problème. Problème qu’il résolu grâce à la peinture. Cela aurait pu être n’importe quel autre loisir à vrai dire. Le fait est que l’ancien Premier Ministre britannique avait parfaitement compris l’importance d’avoir un loisir pour déconnecter du travail.

L’entretient d’un loisir et de nouvelles formes d’intérêts est une habitude prioritaire pour un homme public. […] Pour être vraiment heureux et en sécurité, chacun doit avoir au moins deux ou trois passe-temps, et ils doivent être pris au sérieux.

Winston Churchill

On ne peut pas éteindre la partie de son cerveau qui pense au travail. En revanche on peut faire diversion en allumant une autre partie du cerveau. Comme un papillon qui sera attiré par une lumière plus forte que la précédente, un bon loisir a le pouvoir de nous détourner du travail pour ne plus y penser.

C’est parce qu’un loisir a le pouvoir de nous plonger dans ce que Mihaly Csikszentmihalyi nomme l’état de flow. C’est un état qu’on pourrait résumer par une forme d’hyper concentration. On est complètement absorbé par ce que l’on fait au point d’oublier le monde qui nous entoure. Pour celles et ceux qui cherchent le secret du bonheur, inutile de chercher plus loin, le voilà. D’après Mihaly Csikszentmihalyi, tous les moments que nous passons dans un état de flow contribuent à rendre notre vie plus heureuse et agréable.

Bref le flow c’est de la bonne came. Bien choisir son loisir c’est comme choisir un bon dealer de flow (et pas le tocard du coin qui coupe ça avec des herbes aromatiques).

Le jeu permet de diminuer le stress

Lorsque Churchill découvre la peinture, il est clairement pas au mieux de sa forme. Loin de là même. C’est la peinture qui le sortira de l’enfer personnel et professionnel dans lequel il s’était retrouvé prisonnier.

Je me considère très chanceux d’avoir été capable de développer ce nouveau goût et passe temps aussi tard dans ma vie. La peinture est venue à mon secours lors des moments les plus éprouvants.

Winston Churchill

Lorsqu’on est débordé par le travail et anxieux, notre premier réflexe consiste chaque fois à travailler plus pour sortir la tête de l’eau. Les premières victimes de cette nouvelle politique sont toujours nos loisirs que l’on considère comme de la perte de temps. Bah ouais. Ca ne rapporte pas de thunes. En plus jouer c’est pour les bébés. Du coup on se retrouve enfermé dans un cercle vicieux qui consiste à travailler toujours plus et se reposer toujours moins. Forcément on se sent comme une petite merde un peu plus chaque jour. Alors on persiste à travailler toujours plus et se reposer toujours moins en espérant que que ça nous aidera à sortir de ce merdier dans lequel on s’est fourré. Spoiler alert : non. Comme les sables mouvants, plus on s’agite et plus on s’enfonce. La solution pour en sortir est simple : faut se calmer, ralentir le rythme et sortir lentement.

On pense qu’une personne qui a le temps de s’amuser c’est une personne qui perd son temps. Ou alors qui a mérité de jouer parce qu’elle a été ultra efficace dans son travail. C’est la différence entre le chômeur qui se branle les couilles devant Netflix alors que le milliardaire profite de la vie à la piscine. En réalité glander est une source de productivité qu’on devrait traiter avec autant de sérieux qu’une séance de deep work. On est productif parce qu’on prend le temps de s’amuser. On est débordé parce qu’on travaille tout le temps.

Les loisirs diminuent le stress à fond les ballons. S’amuser permet de sécréter des endorphines qui permettent au corps de se sentir bien. C’est également un excellent moyen pour couper du travail et recharger ses batteries. Mais c’est surtout excellent pour la santé mentale. Quand le monde s’est retrouvé confiné chez soi en 2020, nous sommes des millions à nous être réfugiés dans les jeux vidéo pour tenir le coup. Le hasard faisant bien les choses, pile à ce moment là une étude de l’Université d’Oxford débarqua pour démontrer que les jeux vidéo contribuent au bien être mentale [1].

Si vous souhaitez rester efficace et garder la tête sur les épaules, jouez sans culpabiliser aussi souvent que nécessaire. Plongez vous dans un loisir comme Churchill s’est plongé dans la peinture et glander sans état d’âme. Si vraiment vous sentez une petite piqûre désagréable dans la nuque à l’idée de vous amuser plutôt qu’à travailler, savoir que jouer permet aussi de développer vos compétences professionnelles devrait vous aider.

Le jeu permet d’améliorer ses compétences pro

Au départ Churchill s’est lancé dans la peinture avec aucune autre arrière penser que décrocher un peu du travail. Mais rapidement son entourage et lui on constaté quelque chose de surprenant : il devenait meilleur dans son job. Le fait de peindre régulièrement lui a permis d’aiguiser son sens de l’observation et sa mémoire.

Pratiquer un loisir est loin d’être de la perte de temps. S’amuser nous permet d’apprendre et d’expérimenter dans un cadre sécurisé. On prend plus de risque, on expérimente plus facilement mais surtout on retient mieux. Ce n’est pas un hasard si les animaux apprennent à leurs petits à chasser en jouant. Le jeu permet d’apprendre plus vite et mieux. On apprend à accepter l’échec comme une étape nécessaire vers la progression. On monte en compétence. C’est gratifiant. On gagne en confiance en soi.

Devenez plus productif en jouant

C’est facile dans notre société actuelle de se dire “j’ai pas une minute pour moi”. La réalité c’est que cette minute pour soi il faut se l’accorder. Personne ne viendra nous l’offrir ou nous donner la permission de nous amuser.

Dans l’inconscient collectif le passage à l’âge adulte est associé à la fin du jeu. L’enfant joue alors que l’adulte travaille sérieusement. Culpabiliser de jouer au lieu de travailler, c’est rester dans la posture de l’enfant qui attend qu’on lui donne la permission pour s’amuser. En réalité l’adulte ce n’est pas celui qui cesse de jouer. C’est celui qui décide de jouer sans qu’une autre personne vienne lui donner la permission de le faire.

L’art de la glande c’est ni vivre pour travailler, ni travailler pour vivre. C’est vivre pour le seul plaisir de vivre.

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Note de bas de page

1. Si vous culpabilisez en jouant, maintenant vous savez que c’est bon pour la santé.