Les limites de la créativité

Putain comment on fait pour générer de nouvelles idées ??

On est là, comme un con, bloqué devant notre page blanche depuis une heure sans savoir par quel bout commencer. Tellement de possibilités. Tellement de choses à dire. Commencer une nouvelle création c’est toujours le plus galère. Pendant ce temps il y a d’autres créateurs qui bombardent tellement que c’est à se demander s’ils ont déjà entendu parler du syndrome de la page blanche.

Le problème de la page blanche c’est justement qu’il y a trop de libertés. Une liberté infinie. C’est comme vouloir regarder un film sur Netflix en soirée. On passe tellement de temps à choisir que deux heures plus tard on a toujours pas fait de choix. Trop de films. Trop de choix. Pas de choix.

Un des mythes les plus tenaces est celui de l’artiste en marge du système. Le rêveur contestataire qui rejette le système et s’affranchit des règles. Il marche toute la journée, lit, flâne et rêve en attendant d’être frappé par l’inspiration. Lorsque c’est le cas il arrête tout ce qu’il fait pour se mettre à créer comme s’il était possédé. Puis il se remet à flâner et rêver en attendant d’être possédé à nouveau.

Les règles rebutent toujours. Que ce soit dans notre vie perso ou pro. Qu’on soit créatif ou non. On a tendance à voir la créativité comme une forme de liberté absolue que les règles viendraient limiter. Le génie c’est un mélange d’inspiration et de spontanéité, ça ne se commande pas.

Nique les règles.

Surtout celles des autres.

C’est con parce que se fixer des règles précises c’est justement ce qui permet de décupler sa créativité et ne plus jamais souffrir de la page blanche.

Sommaire
  1. Les limites permettent de surmonter le syndrome de la page blanche
  2. Les limites nourrissent l’imagination
  3. Les limites améliorent la qualité de nos créations
  4. Résumé

Les limites permettent de surmonter le syndrome de la page blanche.

Star Wars ne serait probablement pas le rouleau compresseur qu’il est aujourd’hui si George Lucas n’avait pas respecté à la lettre le concept du monomythe développé par Joseph Campbell.

Dans son livre Le Héros aux mille et un visages, publié en 1949, Campbell décrit les 12 étapes par lesquelles un héros doit passer afin que son aventure soit intéressante. Douze étapes que Lucas suivra scrupuleusement en écrivant les aventures du jeune Luke Skywalker. C’est le respect strict de ces douze étapes qui ont fait de Star Wars : Un nouvel espoir un carton absolu à sa sortie en mai 1977.

De nombreux scénaristes s’imposent le respect de règles similaires pour écrire et lutter contre la page blanche. C’est le cas des scénaristes de la série Rick et Morty. Dan Harmon, un des papas de la série, est également célèbre pour son concept de Cercle Narratif. Huit étapes, en forme de cercles, par lesquelles le héros doit obligatoirement passer pour que son histoire soit digne d’être racontée.

Le Cercle Narratif de Dan Harmon

Inspirées par celles de Joseph Campbell, ces huit étapes sont la base de tous les épisodes de la série depuis sa création jusqu’à aujourd’hui. On voit bien qu’au lieu de brider la créativité, les règles et limites qu’on s’imposent permettent au contraire d’explorer et stimuler sa créativité.

Lorsqu’on souffre de la page blanche c’est bien souvent parce qu’on ne sait jamais par quel bout commencer. Il y a tellement de possibilités ! Se fixer en revanche les bonnes limites c’est comme poser un cadre de travail. Cela revient à canaliser son imagination débordante dans la direction que l’on souhaite. Notre imagination a tendance à partir dans toutes les directions à la fois. De bonnes règles permettent de lui donner une direction.

Les limites nourrissent l’imagination.

En 1942, l’auteur de science fiction Isaac Asimov formulera les trois lois les plus importantes de toute la science fiction : les lois de la robotique. Ces lois sont les suivantes :

  1. Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ;
  2. Un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la première loi ;
  3. Un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n’entre pas en contradiction avec la première ou la deuxième loi.

Ces lois “parfaites et inviolables” sont là pour garantir la sécurité des humains et leur permettre de vivre en harmonie avec des robots de plus en plus intelligents. Toutes les histoires qu’écrira ensuite Asimov serviront à tester les limites et trouver les failles de ces lois.

Avec sa nouvelle Face aux feux du soleil, il réalisera que sa première loi est imparfaite. Dans cette histoire un détective enquête sur un assassinat. Très rapidement celui-ci commence par suspecter un robot. L’assassinat est en violation directe de la première loi, normalement c’est impossible que le robot soit coupable. Pourtant c’est le cas. Ce sont même deux robots qui sont coupables !

Le premier devait verser un poison dans un verre de lait. Techniquement c’est impossible et contraire à la première loi, puisque ça revient à tuer la personne qui boira le lait empoisonné. Sauf si on explique au robot que le lait empoisonné sera jeté immédiatement après. Dans ce cas ça passe. Vient ensuite un deuxième robot à qui on demande de servir le verre de lait à la victime. Là aussi, normalement c’est un meurtre. Sauf si le deuxième robot ignore que le lait est empoisonné. Un robot peut donc malgré lui blesser et tuer un être humain s’il ignore les conséquences de ses actions.

Lorsqu’ils commencent à rédiger le scénario des Aventuriers de l’Arche Perdue [1], la première chose que font George Lucas, Steven Spielberg et Larry Kasdan consiste à se fixer des règles bien précises qu’ils devront suivre tout au long de l’écriture. Une d’entre elles consiste à s’imposer un cliffhanger toutes les dix minutes. C’est à dire placer toutes les dix minutes le héros dans une situation tellement périlleuse que les spectateurs se demanderont comment il pourra s’en sortir.

Si la saga Indiana Jones est considérée comme l’une des plus grande saga du Cinéma, c’est parce que ses créateurs ont su se fixer les bonnes règles, mais surtout les respecter. Asimov, ainsi que d’autres auteurs s’amuseront à tester, étudier, repousser les limites des trois lois de la robotique. Loin de brider la créativité des auteurs de science fiction, ces trois lois sont au contraire à l’origine des plus grandes histoires de science fiction et ont à elles seules révolutionner le genre.

Les règles ne limitent pas l’imagination.

Elles la nourrissent.

Les limites améliorent la qualité de nos créations.

Le solfège est dans le top 3 des règles les plus contraignantes à suivre. Vous avez déjà essayé d’apprendre à lire une partition ? D’apprendre à composer ? C’est. Un. Enfer. Apprendre l’Allemand est plus simple en comparaison. Pourtant c’est le respect stricte du solfège qui a permis à des artistes comme Mozart, Beethoven ou Bach d’exprimer tout leur génie.

Qu’est-ce qui fait qu’une histoire comme Harry Potter nous fascine plus que Percy Jackson ? Pourquoi Matrix est un film culte alors que tout le monde essaie d’oublier Wild Wild West sortie la même année ? Si on met de côté la mort de Mufasa, pourquoi ce dessin animé a autant marqué une génération d’enfants, pendant que Le Lutin Magique est complètement oublié ? C’est tout simplement parce que Matrix, Harry Potter ou Le Roi Lion suivent à la lettre le concept du monomythe théorisé par Joseph Campbell. Les mêmes règles qui feront de Star Wars un carton absolu.

Ce que très peu de gens savent, c’est que Léonard de Vinci a créé de nouvelles règles de peintures. En cherchant absolument à recréer dans ses peintures l’effet de la profondeur d’un paysage, il inventa ce qu’il appelait “la perspective atmosphérique”. Une technique qui le rendra célèbre et fera de lui un des plus grands artistes ayant vécu (entre autres).

Que ce soit au cinéma, dans la peinture, la sculpture ou la littérature, c’est toujours le respect et la maîtrise de certaines règles qui font la différence entre un amateur et un génie.

En résumé
  • En nous donnant un cadre, les règles permettent de surmonter le syndrome de la page blanche. On ne passe plus des heures à se demander ce qu’on va écrire. Le cadre est posé, il suffit de le remplir.

  • En plus de ça, de bonnes règles peuvent stimuler la créativité et nous permettre de générer de nouvelles idées. Un peu comme une machine qui s’auto alimente ou chaque idée mène à une autre.

  • Enfin, bien respectées, elles peuvent améliorer grandement la qualité de nos créations et nous permettre de sortir du lot. C’est le respect et la maîtrise de règles précises qui fait la différence entre un amateur et un pro.

Notes de bas de page

[1] Voici une transcription du brainstorming lors de l’écriture d’Indiana Jones entre George Lucas, Steven Spielberg et Larry Kasdan. C’est passionnant !

Merci d’avoir lu jusqu’au bout !

Si t’es créateur de contenu et que tu ne veux plus te prendre la tête, j’ai créé une mini-formation gratuite pour créer du contenu plus facilement et t’aider à faire d’une pierre trois coups.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :